Il fallait que je bouge. Une sorte de désir inexplicable m’entraînait dehors alors que je ne pouvais rien y faire. L’intérieur de mon appartement me semblait de plus en plus minable, lugubre, sans aucun intérêt. La nuit était complète, le noir avait envahis chaque rue, chaque ruelle. Les réverbères c’étaient allumés comme à leur habitude, la vie semblait vraiment trépidante… Cette routine, cette lassitude à marcher toujours dans les mêmes rues, faire exactement les mêmes choses chaque jour me rendais malade. Je sentais le monde autour de moi partir, devenir totalement hors de contrôle et à la fois contrôlé. Comme si quelqu’un modelait ce monde qu’il venait de créer dans un chao régulé. J’attrapais mon sac avant de m’enfuir de cette ambiance lourde qui pesait dans mon appart’, je songea furtivement à appeler Vitali mais pourquoi faire ? Il n’écouterait probablement pas ce que j’ai à lui dire une fois de plus et je me sentirais d’autant plus seule et inutile. Il me fallait un nouvel air, une rencontre, de l’action. Quitte à me battre, à voir du sang, plus grand-chose n’avait d’importance. Pourtant ce sentiment m’était totalement inconnu, jamais je n’avais eu pour habitude de me sentir seule, inutile ou encore abattue de la sorte. De nature plutôt optimiste le pessimisme dont je faisais preuve à cet instant avait plutôt tendance à me renfermer dans mon inconfortable malaise.

La grande rue de Piccadilly me semblait particulièrement envoûtante, pourtant ce n’est pas vraiment un endroit attirant… Peut être dans un élan d masochisme je me suis dit que cette rue pouvait m’apporter l’action que je recherchais tant. Par ailleurs je n’y ai pas coupé, la musique, mon échappatoire à moi, que j’avais dans les oreilles, je du la couper. Une lumière étonnamment puissante venait d’apparaître devant mes yeux. J’étais bien trop loin pour pouvoir distinguer de quoi il s’agissait. Mon masochisme et sadisme humain s’empara une nouvelle fois de mon corps et de mon esprit, me poussant vers ce feu qui venait d’être déclanché. Alors que mes talons faisaient un bruit que je ne supportais pas sur le trottoir glacé de cette ville aussi froide je ne fis pas vraiment attention où je marchais. C’est alors que je lui rentrais dedans. « Excusez moi, sincèrement… Je ne regardais pas où j’allais… » Je ne savais pas à qui j’avais affaire mais je m’excusais, quelle idiote… Pourtant un minimum de politesse aurait fait du bien à tout le monde, enfin presque.
C’est alors que je vis la voiture, mon esprit ne mit pas des années avant de faire le rapprochement, cette homme qui se tenait à une limite très peut respectable de mon corps semblait être l’auteur de ce feu, pourtant on pouvait voir sur son visage un rictus de « joie » du moins si l’on peut appeler ça de la joie…
Je n’avais plus qu’une envie, lui demander pourquoi. Allez savoir pourquoi, ma bouche ne réussissait pas à s’ouvrir, mon esprit s’imaginait des tas de choses les plus horribles les unes que les autres. Un vampire torturé avant d’être brûlé ? Un humain vidé de son sang puis carbonisé dans cette voiture ? En ces temps ci toutes les solutions imaginées par mon esprit me semblaient d’une logique inébranlable… C’est fou comme les guerres peuvent rendre les hommes les plus sympathiques en bêtes les plus monstrueuses…