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Promenons-nous dans les bois {R.

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Promenons-nous dans les bois {R. Vide
MessageSujet: Promenons-nous dans les bois {R. Promenons-nous dans les bois {R. EmptyMer 30 Sep - 11:07

    Deux semaines s'étaient écoulées depuis la rencontre avec cette jeune humaine. L'ennemi public numéro un se corrigea-t-il en maugréant. La débâcle que le Spirit avait essuyé avec son hôte lui était toujours en travers de la gorge. Dire qu'il l'avait cru inoffensif au point de se soumettre sans une once de difficulté. Il aurait dû se méfier mais dans son arrogance, il avait fermé les yeux. Une erreur qui ne se reproduira plus. Pour l'heure, il cherchait une future victime. Un vampire sans conteste. Moins il y en aurait et plus, il était en mesure de penser qu'il survivrait. Tuer ou être tué, telle était la question ; Etre en vous et moi, il ne se la posait pas : il vivrait. Son hôte lui, il mourrait dans d'atroces souffrances. Une façon comme une autre de payer pour cette rébellion. L'entité restait toutefois sceptique. Comment diable avait-il pu perdre le contrôle aussi facilement?! Les sentiments qu'éprouvaient le sorcier à l'égard de cette jeune humaine étaient-ils si puissants pour se dérober à son emprise? Cette introspection l'ennuyait. Autant faire quelque chose de plus utile comme tuer, torturer et infecter. Son train train quotidien. Ses pas le conduisirent alors sur Piccadilly, anciennement si riche et prestigieuse. Aujourd'hui, il n'en restait rien si ce n'est un spectacle désolant dont il se sentait bêtement fier. La destruction était comment dire un de ses principaux hobbies, pourquoi le nier? Quelques âmes égarées marchaient encore dans les rues autrefois pleines de monde. De pathétiques humains qui –il était sûr ; se coucherait en face de lui dans l'unique et futile espoir d'être épargnés. Seulement, ce soir, le Spirit désirait ardemment trouver une proie de choix, un festin gargantuesque et non un amuse gueule. Il était d'humeur sadique, joueuse. Un simple quidam ne serait pas intéressant et le frustrerait plus que de raison. Alors, sous l'enveloppe charnelle de Ricochet O. Archibald, l'entité poursuivit d'arpenter les rues.

    Des heures s'écoulèrent sans qu'il ne trouve quelque chose pour se satisfaire et son humeur s'en faisait durement ressentir. A croire qu'il avait épuisé son quota de victimes alléchantes. Rien n'était plus faux dans la mesure où cette humaine respirait encore. A cette pensée, ses yeux ressemblèrent à deux fentes glaciales. Si jamais, il la retrouvait, elle passerait un mauvais moment. Comme il aurait aimé pouvoir la tenir entre ses mains, faire que son cauchemar soit sans fin. Qu'elle soit sienne. Le Spirit pouvait presque ressentir le frisson d'excitation qu'il subissait à chaque fois qu'il prenait une vie. Le simple fait d'avoir le pouvoir de vie ou de mort sur un être était grandiose. Personne ne s'imagine à quel point, on ressentait cet élan de pouvoir, cette puissance faramineuse qui bandait tous ses muscles. Même son hôte éprouvait cette joie malsaine avant de se tordre de culpabilité. La conscience humaine pouvait se montrer sans pitié avec les faibles d'esprit. Pourquoi s'ôter une pareille jouissance? Au nom de quoi? Un réverbère s'alluma à ses côtés, le tirant ainsi de sa morbide rêverie. Le soleil se couchait et très vite, l'obscurité régnerait en maitre sur la ville et sur cette rue. Le moment idéal de passer à l'action, de se sortir de cette inactivité qui lui pesait.

    Son regard se porta alors autour de lui alors qu'il sautait souplement sur un muret avant de s'arrêter subitement, telle une statue de marbre. Elle était enfin entrée en jeu. Sa proie, sa sublime et magnifique future victime. Pour une raison qu'il ignorait, il fallait que ce soit elle. Comme un songe venu du passé. Réminiscence qui ne lui appartenait pas. Non, elle venait de son hôte. Il semblait perturbé par cette présence mais pas comme avec l'humaine. Un mélange de colère, de mépris et d'un autre sentiment qu'il n'identifiait pas. Rien de mieux pour l'intriguer et l'amuser dans un même temps. Que la chasse commence. Marchant souplement, il paraissait fantomatique tant on n'entendait à peine le bruit de ses pas. Seul un petit sifflement le trahissait. Une vieille continue humaine trottait dans sa tête: "promenons-nous dans les bois, pendant que le loup n'y est pas. Si le loup y était, il nous mangerait." D'où venait-elle? Aucune idée mais il ne pouvait s'empêcher de siffloter gaiement. A croire que la joie malsaine qu'il éprouvait trahissait vraiment son état d'esprit. L'image de Ricochet continuait de suivre cette femme, à quelques mètres, peut-être une vingtaine d'elle. Elle était loin d'imaginer des sombres tortures qui l'attendaient. Ce soir, elle crierait, elle supplierait et elle périrait –du moins, c'était le programme qu'il se préparait mentalement à vivre. Depuis la mésaventure avec cette Imogen, il préférait jouer la carte de la prudence. Or, son hôte continuait de se montrer agité ! "Je me demande ce qu'il t'arrive pauvre petit mortel" songea-t-il distraitement alors qu'il s'engouffrait dans une rue perpendiculaire pour se camoufler au regard scrutateur de l'inconnue. Allez, un peu de patience et il aurait les réponses à ses questions. Tout n'était qu'une question de temps !
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MessageSujet: Re: Promenons-nous dans les bois {R. Promenons-nous dans les bois {R. EmptyMar 13 Oct - 22:27

Il faisait sombre et si Satine n’était pas du genre à frissonner au moindre hululement ténébreux ou au moindre froissement léger, il fallait avouer que se savoir seule, à l’air libre, sans autre protection que sa baguette magique ne la rassurait nullement. Autrefois, son patronyme lui servait de bouclier psychologique, convaincue que son nom de famille lui assurerait une sauvegarde certaine. En effet, qui irait s’attaquer à une Blackhart ? Mais les temps avaient changé. Sur deux années, ce qui représentait son assurance et son impétuosité s’était transformé en malédiction, tout simplement. Elle ne revendiquait plus ce nom qui faisait frémir les plus fragiles, elle le reniait, au contraire, non plus seulement parce qu’il était le malheur de son jumeau mais également parce qu’il était devenu son propre fardeau.
Des mois qu’elle n’avait revu sa mère. La dernière image qu’elle avait d’elle la dégoûtait littéralement. Le souvenir était trouble de douleur mais il était bel et bien présent alors que, emmenée de force par les autorités magiques, elle avait entraperçu le visage maternel qui lui conseillait de dénoncer son frère, pire, elle la suppliait de délivrer les informations dont le Ministère voulait. Ne voyait-elle donc pas ? N’avait-elle donc pas compris que ce qui unissait sa fille et son fils était au-delà de la trahison ? Qu’elle préférerait être tuée que d’offrir ce bonheur à ces traîtres ? Elle préférait qu’on lui ôte son âme d’un coup d’ « Avada Kedavra » plutôt que de laisser sa langue prononcer des mots qui s’avérerait fatals pour Eethaniel. Son amour était au-delà de tout ce que Mme Blackhart pouvait concevoir et c’est cette seule pensée qui lui avait permis de tenir bon durant ces moments pénibles ; des moments où les larmes s’étaient échappées, bien malgré la volonté de la jeune Sorcière. Elle ne voulait pas leur offrir ce plaisir mais la douleur était bien trop forte pour qu’elle retienne les symptômes douloureux. Elle avait crié, hurlé, s’était tordue de douleur, elle avait pleuré mais à aucun moment elle n’avait été proche de révéler où se trouvait son frère. De toute manière, elle n’en savait rien mais quand bien même l’information aurait-elle été cachée quelque part dans un recoin de son cerveau, nul filtre magique, nul Veritaserum ne serait parvenu à délier sa langue. Du moins, était-elle convaincue de cela.
Si elle avait voulu se plier entièrement aux recommandations d’Eethaniel, elle aurait dû rester cloîtrée chez elle mais une blessure causée par un sortilège maladroit s’était rouverte et elle s’était faufilée dans la nuit noire pour aller chercher le remède adéquat chez un marchand au noir qui le lui avait vendu pour un prix exorbitant. Lorsqu’elle lui avait fait remarquer que le produit ne valait pas le dixième de ce qu’il en demandait, le commerçant lui avait répondu que si elle trouvait moins cher ailleurs, elle pouvait aller voir là-bas. Cette simple remarque acerbe avait suffi à faire taire l’impétueuse jeune Sorcière. Bien forcée d’admettre qu’il n’avait pas tort, elle s’était délestée de la somme exagérée avec regret et avait attrapé la fiole qu’il lui tendait en échange. Cet argent, elle aurait pu le garder pour autre chose mais la nécessité de panser la blessure était telle qu’elle se devait de faire ce sacrifice. Elle ne cherchait pas volontairement à désobéir à son amant, son adoré, son âme sœur mais que pouvait-elle faire d’autre ? Elle n’avait jamais été d’un courage phénoménal. Il lui manquait cruellement, déchirant son cœur déjà lacéré par les griffes du temps et en plus de cela, elle aurait dû supporter la souffrance lancinante causée par une plaie béante ? Tant pis, elle faisait preuve de bien peu de courage mais elle voulait simplement ne plus souffrir, si cela était possible, si loin de lui, dans l’incapacité totale de le toucher.
Voilà la pensée qui lui traversait l’esprit alors qu’elle se faufilait avec lenteur dans les alentours de ce qui était autrefois Piccadilly.
Elle s’y était rendue, encore adolescente, grisée à l’idée de se balader dans ce quartier célèbre et dégoûtée, également, d’être ainsi cernée par des humains, cette race qu’elle avait en horreur à l’époque et qui ne représentait plus aucun intérêt à ses yeux, à présent. Tout juste si elle réalisait que des silhouettes isolées marchaient encore ça et là. Elle n’en avait rien à faire, l’antidote faisait peu à peu son effet et la douleur se calmait. Elle mettrait des heures à disparaître complètement mais en attendant, le mal qui la rongeait s’épuisait et elle pouvait à nouveau respirer avec plus de liberté. Elle marchait, les bras serrés contre son estomac douloureux, le regard figé sur les dalles grises craquelées en certains endroits. Des bruits des pas légers résonnaient autour d’elle mais son esprit tentait au mieux d’ignorer le souffle glacial qui glissait sur sa colonne vertébrale, comme si quelque chose s’apprêtait à lui sauter à la gorge, un mal contre lequel elle n’aurait cette fois aucun remède, contre lequel la lutte serait inutile, car bien inégale.
En plus d’être bipolaire, elle se savait particulièrement paranoïaque. D’autant plus depuis qu’elle était livrée à elle-même, loin des siens, loin de lui, surtout. C’est comme si le monde était un prédateur qui n’attendait qu’une chose : la possibilité de les engloutir, elle et son égo surdimensionné. Pourtant, ce sentiment d’être observée ou suivie ne s’estompa pas, malgré sa volonté de retrouver la raison, de rationaliser sa peur pour la faire diminuer, à défaut de pouvoir l’éliminer entièrement et lorsqu’elle se tourna vivement, le cœur battant, avec la sensation que quelque chose clochait, ce fut pour découvrir que son sillon était désert. Personne ne la suivait et pourtant, l’effroi ne cessait de grandir. Elle secoua la tête, tentant vainement de chasser ses sombres pensées de son esprit torturé pour ensuite reprendre sa marche, accélérant le pas, comme si ça pourrait semer le trouble que ces lieux ténébreux avaient glissé dans le cœur fragile de Satine Blackhart.
Elle voulait Eethaniel. Elle le voulait de tout son cœur, de toute son âme et les larmes vinrent picorer ses paupières maquillées sombrement, comme à son habitude. Les cernes s’étaient agrandies comme elle perdait le sommeil, seule, isolée, terrorisée et perdue. Ses membres tremblaient d’eux-mêmes et elle était incapable de calmer son esprit paniqué par quelque chose d’inqualifiable, quelque chose qu’elle ne parvenait pas à identifier. Un froid indescriptible hérissa les poils de ses avant-bras, malgré la couche épaisse de vêtements qu’elle avait sur le dos.
Quelque chose ne tournait pas rond et son cœur était à deux doigts d’exploser lorsqu’elle se figea soudainement, tétanisée et soulagée à la fois. Soulagée de comprendre qu’elle n’était pas folle, qu’un danger mortel était effectivement sur ses talons et que sa paranoïa n’était pas feinte. Ses membres refusaient d’obéir aux ordres faibles que son cerveau envoyait, aussi fût elle incapable de courir, comme si elle était piégée dans un de ces propres cauchemars, de ceux où la fuite semble impossible, entravée par des obstacles infranchissables ou par des membres qui ne répondaient plus présents.
Cette fois, Satine ne dormait pas, elle était bel et bien dans la réalité et cette constatation ne fit qu’accroître la terreur grandissante qui enveloppait son cœur et son esprit.
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MessageSujet: Re: Promenons-nous dans les bois {R. Promenons-nous dans les bois {R. EmptyJeu 12 Nov - 15:00

    Ricochet ou ce qu’il en restait continuait sa traque sans répit. La fuite serait impossible pour sa proie. Elle n’avait aucune chance de réchapper à son funeste destin. Non. Il n’admettrait pas une seconde fois l’échec et quelque chose en son hôte lui donnait cette fébrilité jouissive. Qu’est-ce qu’il s’était passé dans son passé pour qu’il haïsse cette femme à ce point ? Pourtant, il n’arrivait à saisir ce souvenir, un rejet se produisait toujours à ce moment là. Encore et toujours cette vaine résistance. Il ploierait comme tous les autres. Tout n’était qu’une question de temps. Il mourrait avec elle. QUoiqu’il arrive, quoiqu’il essaie. Mais cela restait divertissant de le voir se débattre comme cette proie qui accélérait la cadence comme pour fuir ce danger invisible. Dieu qu’il se montrerait sans pitié et sans scrupule. Cruel. Sadique. Un fin sourire se dessina sur ses lèvres –ou plutôt un rictus. Ses cris, ses larmes. Il s’en délecterait au possible. Elle n’en réchappera pas. Elle allait prier le ciel qu’on l’achève, qu’on lui épargne cette peine. Vaine prière. Vaine fuite. Vaine résistance. Tout était vain chez les humains et les sorciers. Aucun secours. Le Spirit se délectait déjà de leurs cris obscènes. Tous les morts qu’il comptabilisait, toutes ses séances de tortures. Même s’il devait en mourir, jamais son hôte ne redeviendrait lui-même. Il l’avait traumatisé à vie. « Ou il nous mangera » continua-t-il de chantonner faiblement avec pour seul témoin, les réverbères de la rue. Sa proie respirait la crainte. Il pouvait le ressentir dans toutes les fibres de ce corps possédé. Jouissif. Tout ceci allait être jouissif.

    Le Spirit se cacha alors brusquement dans une allée adjacente pour se dissimuler au regard paniqué de sa proie. Elle avait remarqué sa présence. Il en était certain. La réalité de sa triste vie prenait tout son sens en elle. Le moment était arrivé. Elle se savait condamnée. Personne autour d’elle pour l’aider et qui viendrait aider une femme aux prises d’un Spirit ? La peur de se savoir contaminé refroidissait les ardeurs des plus téméraires d’entre eux. C’était fou comme l’élan de solidarité s’était amoindrit. A croire que les humains ne savaient s’entraidaient qu’après le drame quand plus rien ne pouvait être réalisé pour sauver la situation. Simplement recoller les morceaux. Personne ne bougeait le petit doigt avant. Non, chacun pour soi ! Après on verra ce qu’il reste de la débâcle. Un petit rire cynique s’échappa des lèvres du démon. Désirant s’amuser avec cette proie, il sifflota un air sinistre, transplanant ici et là pour l’induire en erreur, pour la pousser justement là où il le voulait. Ce petit jeu du chat et de la souris se poursuivit jusqu’à ce qu’elle aboutisse dans cette ruelle sans issue. Alors, ce n’est que maintenant qu’il se montra à elle. Un sourire cruel étirant ses lèvres. « Bonjour jeune demoiselle. A ton regard, je vois que tu reconnais mon hôte. Lui aussi ne t’a pas oublié. Humm cette colère, et cette peur. Que c’est intéressant » prononça-t-il d’une voix doucereuse et lancinante. Un rire fit tressauter ses épaules alors qu’il s’approchait encore et encore de sa cible. Quelques flashs emportèrent son esprit dans le passé. Les joutes verbales, les sorts envoyés. Oui, les deux sorciers ne s’aimaient vraiment pas même si cette relation était ambigüe à certains endroits. Comme un accord tacite d’agression. « Satine. Oui, Satine. C’est ton prénom. Hum je me souviens de toi désormais. Quelle ironie. Un de tes plus fidèles détracteurs va te conduire à ta perte. Justice divine. D’ailleurs crois-tu en une quelconque divinité ? Il est toujours agréable d’avoir quelqu’un à supplier. Enfin, si ce n’est que ça, tu peux toujours me supplier. Cela ne fera qu’ajouter un peu plus de piment » ajouta-t-il en la faisant toujours et encore reculer.

    Au fond de lui, tout ceci l’amusait. Grandement. Perversement. Il était toujours divertissant de torturer physiquement et psychologiquement une victime mais quand celle-ci était l’ennemie de votre hôte et que ce dernier était partagé entre le mal et le bien. Il n’y avait aucun mot pour décrire ce qu’il ressentait à cet instant précis.

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MessageSujet: Re: Promenons-nous dans les bois {R. Promenons-nous dans les bois {R. EmptyLun 23 Nov - 23:30

Son instinct de préservation lui sommait de fuir, même si cela semblait désespéré, inutile et illusoire. C’était un grondement venu du plus profond de son être, tellement basique qu’elle était incapable d’agir autrement qu’en l’écoutant. Son cœur était en pagaille, il bataillait contre son esprit terrorisé. « Cours, pauvre idiote ! Cours ! » Mais ses jambes semblaient faites de coton, sa gorge s’était asséchée et son cœur semblait avoir augmenté de volume, triplant sa taille pour encombrer sa cage thoracique étroite. La faiblesse la prit de court. Jamais elle ne s’était sentie aussi idiote, à la merci d’une ombre qu’elle ne parvenait pas à identifier et qui pouvait apparaitre sous n’importe quelle forme. Elle n’était qu’une misérable sorcière et si elle n’avait pas été aussi bornée, peut-être qu’elle aurait les moyens de se défendre, à l’heure qu’il est. Si elle avait laissé Eethaniel la rendre immortelle, comme il désirait le faire depuis si longtemps, elle n’en serait pas là. Elle rageait contre elle-même à cet instant précis, comme elle sentait l’ombre du danger l’envelopper insidieusement jusqu’à ce qu’elle soit prisonnière de sa propre terreur. Ce serait cette frousse bleue qui aurait raison de sa misérable vie, si cela continuait.
Mais elle ne pouvait pas laisser une telle chose se produire. Qu’adviendrait-il de cet avenir radieux qu’elle avait envisagé ? Que se passerait-il si la vie lui était ôtée d’un claquement de doigts ? Elle le savait parfaitement. Elle disparaitrait de la planète, inexistante, comme si sa vie n’avait jamais été importante et lui, immortel, il vivrait à jamais, sans elle. Oh, elle ne doutait pas qu’une autre prendrait soin de lui, mais imaginer une seule seconde qu’il puisse éprouver quoi que ce soit pour une autre la mettait dans une rage folle. C’est cette même rage qui lui permit de reprendre sa route, légèrement titubante, affaiblie par l’angoisse qui la bouffait de l’intérieur.
Poursuivie par cette ombre funeste invisible et menaçante, elle marcha, avec une lenteur confondante qui lui donnait envie de hurler. Elle exhortait intérieurement ses membres d’accélérer la cadence mais ceux-ci refusaient d’obéir. C’était comme s’ils essayaient à tout prix de réfréner les ordres envoyés par son esprit.
Un faible chant, lointain et mielleux, parvint aux oreilles de la jeune Emeraude qui n’en perçut pourtant pas le contenu. Elle aurait été incapable de répéter ce que son prédateur venait de lancer, dans son dos. En tous les cas, ce n’était pas bon signe pour la jeune femme. Lorsqu’elle fit volte-face, sans grande surprise, elle se retrouva face au désert. C’était comme si toute cette traque n’était que le fruit de son imagination. Mais elle était certaine que non, que son poursuivant était bien réel et plus il approchait, plus un sentiment étrange étreignait le cœur de Satine, sans qu’elle parvienne à en identifier l’origine pour autant. C’était comme si elle reconnaissait cette voix mélodieuse, ce chant sadique qui venait bercer ses oreilles. Il était clair que son poursuivant se délectait de cette chasse qui n’en était pas réellement une. Il s’amusait follement et faisait durer le plaisir. Un rire résonna faiblement et un long courant de frissons vint caresser la peau de Satine, malgré l’épaisse couche qui la recouvrait. Elle jeta un coup d’œil par-dessus son épaule, guettant le moindre signe qui pourrait l’aider à situer le danger que représentait l’être inconnu. S’agissait-il d’un Sorcier du Ministère, d’un Vampire ou pire encore, d’un Magicien possédé… Cette pensée fit l’effet d’une douche froide à la jeune femme qui préféra continuer sa route, espérant qu’il se lasserait de son petit jeu malsain et se montrerait enfin. Prier pour qu’il abandonne sa chasse aurait été complètement stupide, cela n’arriverait jamais.
Elle n’avait plus les idées claires, tout s’embrouillait dans son esprit et elle ne réalisa la bêtise de sa fuite illusoire que lorsqu’elle se retrouva face à un mur trop haut pour être escaladé. Piégée comme une vulgaire souris. Elle fit volte-face et il apparut et les yeux chocolat de la jeune Blackhart s’écarquillèrent de surprise. Ricochet, son cher rival de joutes verbales se tenait devant elle. Aussitôt, une nuée de souvenirs se glissa devant elle. Combien de fois ne l’avait-il pas agacée avec sa répartie imparable ? Combien de fois n’avait-elle pas souhaité l’étrangler ? Et pourtant, à l’instant précis, elle lui aurait sauté au cou si elle avait pu, si elle n’avait pas remarqué, après une poignée de secondes, que le regard de son ancien meilleur ennemi était voilé d’une menace indéchiffrable qu’elle n’avait aucun mal à identifier. Son cœur se serra à l’idée que le jeune Sorcier ait été ensorcelé, privé de son libre arbitre par un être sans visage, qui se glissait d’hôte en hôte, se moquant bien du sort du malheureux dont il occupait le corps. Etrangement, c’était la pitié qui était venue envahir les traits de Satine. Même le sourire qu’il affichait, s’il semblait familier à la jeune Blackhart, était aussi étranger et vile que l’entité qui avait pris possession du corps du jeune homme. Elle ne pouvait se fier à cette forme physique agréable, tout ce qu’il représentait était à présent le danger. Pourtant, une idée germa lentement dans l’esprit de la demoiselle, alors que son adversaire s’adressait à elle, avec la voix familière de Rick, si trompeuse.
C’était la première fois qu’elle entendait un envoûté parler, la façon dont l’entité lui parla lui parut enjôleuse, mielleuse et par-dessus tout, dangereuse. Déglutissant avec peine, elle ne le quitta pas du regard, tandis que son cerveau fonctionnait à toute allure, à la recherche d’une solution qui lui permettrait de s’en sortir vivante. Il s’approchait et elle, victime de sa condition et de sa faiblesse, elle reculait jusqu’à se retrouver adossée à la paroi humide, incapable d’aller plus loin.

« Satine. Oui, Satine » prononça-t-il étrangement. C’était comme si elle n’avait jamais entendu Ricochet prononcer son prénom auparavant, lui donnant une saveur différente maintenant que ses lèvres transmettaient ces mots. « D’ailleurs, crois-tu en une quelconque divinité ? » La question surprit la jeune femme qui fronça les sourcils, méfiante, mais l’écoutant toujours avec attention. La menace planait toujours mais c’était comme si le fait que l’envoûté la connaissait jetait une lueur d’espoir sur cette situation sans issue.

Il voulait qu’elle le supplie. Cela l’amuserait probablement beaucoup qu’elle hurle, que ses supplications résonnent dans la ruelle et qu’il sente que sa douleur n’était pas feinte mais bien ancrée dans chacune de ses cellules.
Elle n’avait pas grand espoir de s’en sortir alors elle tenta le tout pour le tout, quitte à courir à sa perte. Serrant les dents, elle fit un pas en avant, son dos ne toucha plus les briques humides et elle trouva la force de rester sans bouger, fixant sans ciller le regard de son adversaire. C’était tellement lui sans être lui. Chacun de ses traits rappelait à la jeune femme les joyeux moments qu’ils avaient passés à se pourrir la vie mutuellement. Loin d’être devenu un véritable rituel, il avait s’agit d’un jeu dans lequel ils excellaient, maîtres de leurs mots et de leur impétuosité respective. Elle espérait sincèrement qu’il restait assez de combativité chez son meilleur ennemi pour lui venir en aide, sans quoi elle pouvait dire adieu à un quelconque avenir avec son frère.

« Apparemment tu ne contrôles pas suffisamment la mémoire de ton hôte.. » répliqua-t-elle en essayant péniblement de maîtriser sa voix, bien que consciente que le Spirit percevait chacun de ses battements de cœur, chacune de ses émotions. « … sinon tu saurais qu’une Blackhart ne supplie pas. Il n’y est pas parvenu, tu n’y remédieras certainement pas ! » C’était audacieux, suicidaire, même, mais au fond, elle croyait pleinement en Ricochet, elle mettait toute sa foi dans sa force à lui, car il était l’unique personne à pouvoir la sauver à présent puisqu’Eethaniel était dans l’incapacité de savoir dans quels ennuis elle s’était fourrée. « Je sais que tu es quelque part au fond, reviens, bats-toi ! »

Elle se mordilla la lèvre inférieure, tenaillée entre l’envie de pleurer et de hurler. Il ne s’agissait même plus de son sort à elle uniquement, mais également celui du jeune homme. Malgré les apparences, elle s’y était attachée et ce n’était que maintenant qu’elle s’en rendait compte.
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