La porte grinça et la silhouette fine de Satine apparut dans l’entrebâillement. Elle jeta un coup d’œil à l’intérieur de la pièce où Eethaniel dormait puis pénétra dans la chambre, silencieuse, tel un chat aux pattes de velours. Elle referma doucement sur elle et resta adossée quelques secondes contre le bois rugueux, le souffle court, le ventre oppressé par le calme. Eethaniel semblait dormir, ou bien il feignait encore le sommeil profond. Satine déglutit et quitta son poste pour s’approcher du lit. Elle se pinça les lèvres en observant les traits sérieux de son jumeau. Même dans la semi-pénombre, elle pouvait distinguer sa moue torturée, comme si le repos ne pouvait pas apaiser le mal qui grondait en lui. Elle esquissa un sourire triste, le genre que personne ne pourrait entrapercevoir, même le temps d’une seconde. Le seul qui aurait pu était Eethaniel et même face à lui, elle réprimait ce genre d’expression d’affection. Elle était certaine qu’il n’apprécierait pas sa faiblesse. Le lien unique qui les unissait devait rester secret, elle tâcherait donc de ne pas faillir à la tâche.
Les doigts de la jeune fille effleurèrent la joue d’Eethaniel et elle cessa son geste, ramenant son bras contre elle, de peur de réveiller le jeune homme. Elle se mordilla la lèvre inférieure, jeta un coup d’œil à la porte, hésitant encore à laisser libre cours à son instinct. Elle aurait pu retourner d’où elle venait, rejoindre son lit et écouter le silence absorbant de la maison, brisé de temps à autre par les marmonnements de son frère aîné qui parlait dans son sommeil mais les éclats de voix venaient sans cesse la harceler. Chaque fois qu’elle fermait les yeux, elle entendait les injures que son père avait proférées à l’encontre d’Eethaniel. Elle les rouvrait donc aussitôt, les poings serrés, le cœur battant, ruminant contre son manque d’utilité. Elle voulait se tenir entre leur père et son frère, elle voulait qu’il cesse immédiatement de rabaisser Eethaniel à la première bévue. Mais elle savait pertinemment que dès qu’elle oserait émettre un son en faveur de son jumeau, la colère de M. Blackhart n’en serait qu’accrue. Rester silencieuse lorsqu’il était violemment malmené était une vraie torture pour la jeune femme.
Raison pour laquelle elle se tenait à côté du lit à présent, écoutant la respiration apaisante de son jumeau. Elle posa un pied sur le bord du matelas et grimpa sur le lit, enjambant le grand corps d’Eethaniel, grimaçant à chaque craquement des lattes du lit sous son poids. Elle se retrouva du côté du mur et s’installa maladroitement entre celui-ci et Eethaniel. Elle tira un pan de la couverture sur elle et se blottit contre le jeune homme endormi, la joue pressée contre son torse, le bras enveloppant son ventre. Elle écouta longuement le cœur d’Eethaniel battre paisiblement et elle ferma les yeux.
Il n’y avait qu’en sa présence que ses maux disparaissaient. Il était comme un remède éternel au tourment qui enveloppait Satine. Pourtant, on ne pouvait pas dire que son enfance aie été difficile. Fille cadette des Blackhart, elle avait toujours été choyée et gâtée par leur mère. Ses frères l’entouraient, la protégeant et la forçant à se forger un caractère digne d’une tigresse. Elle avait toujours vaqué à ses occupations sans devoir rendre des comptes, le moindre de ses désirs était un ordre et elle partageait une relation presque fusionnelle avec Eethaniel. Elle aurait dû être comblée. Elle l’aurait été si, à ses côtés, son jumeau n’avait pas souffert pour deux. Alors elle avait développé cette personnalité à double tranchant : d’un côté, Satine l’enjôleuse, qui n’hésite pas user de son charme félin pour obtenir ce qu’elle désire, qui peut se montrer d’une courtoisie exagérée et être douce comme un cœur. De l’autre, il y a la Satine capricieuse et ambitieuse à souhait, jalousant la moindre personne qui en viendrait à trop s’approcher d’Eethaniel, haïssant le moindre obstacle qui s’intercalerait entre elle et lui.
Entre elle et lui. Toute la vie de Satine tourne autour de son frère jumeau.
Une longue inspiration la tira de ses sombres pensées et elle sentit avec délice le bras d’Eethaniel l’enlacer, répondant à son étreinte. Il respira différemment et elle pressentit qu’il avait abandonné l’inconscience pour la rejoindre dans la conscience. Elle redressa légèrement la tête, de façon à sentir la joue rugueuse d’Eethaniel contre son front et elle souffla, la voix à peine audible, tremblante :
- Je lui ferai payer le mal qu’il te fait. Je te le jure. Je ferai payer à quiconque ose encore tenter de te détruire..Hors JeuLeelo. 22.
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